Pourris (tous?), Palestine, Peres et Problème de l'adhésion Turque

Publié le par Francois MITTERRAND

Jean-Christophe Cambadélis à un meeting du Parti socialiste, 29 mai 2007

Pour débuter ce post sur ces 4P de l'actualité, je voulais revenir sur les accusations portées contre M. Cambadélis sur ce blog ou ailleurs, et sur les hommes politiques en général. Il me semble que ce qui importe lorsqu'on émet un jugement sur la moralité de tel ou tel, c'est de prendre garde à tomber dans la facilité ('tous pourris') et lorsque  quelqu'un est suspecté d'avoir mal agi, savoir ce qu'on lui reproche exactement.
Certains diront que je suis mal placé pour donner des leçons de moralité, pourtant j'ai porté toute ma vie des valeurs fortes qui n'étaient pas négociables. On m'a fait tant de faux procès au cours de ma vie que je sais combien est lourd le poids du soupçon. Et bien que ce M. Cambadelis ait été un jeune communiste qui n'a pas hésité à lutter contre moi de longues années, je pense que les attaques qui lui sont faites ici sont un peu dures.
Il s'est expliqué à ma connaissance dans les rares affaires ou la justice a eu à travailler sur son rôle, notamment le scandale de la MNEF et a été condamné à une peine légère, prescrite à la demande du parquet. Il ne faut pas critiquer tout le temps le nouvel élu sur son interférence avec l'indépendance de la justice d'une part et ne pas faire confiance à cette même justice pour punir les coupables d'autre part...
Les politiques, comme les autres citoyens ont des brebis galeuses dans leurs rangs, mais de là à faire des généralités, il y a un pas que je me garderais bien de franchir. Il faut condamner sévérement les dérives, surtout dès lors qu'il y a enrichissement personnel, comme cela semble avoir été le cas avec un certain Jacques Chirac, mais rester prudent sur les affaires dont la presse fait ses choux gras alors qu'il ne s'agit parfois que de peccadilles.
Il est possible que je n'ai pas tous les éléments, et je suis ouvert au dialogue dans les commentaires.


Des partisans du Hamas avancent dans les rues de Gaza pour en découdre avec leurs rivaux du Fatah.Hams/AFP
Passons au sujet brûlant du moment, l'actualité toujours aussi dramatique au Proche Orient. La guerre civile qui a lieu en Palestine entre le Hamas et le Fatah, dernier épisode d'un conflit multi-séculaire, semble démontrer la radicalisation des palestiniens. Après s'être exprimée dans les urnes et avoir mené les islamistes du Hamas au pouvoir, c'est dans le sang que ce parti prend le pouvoir qui lui manque encore et cet épisode est de nature à inquiéter pour le futur d'une région déjà maintes fois endeuillée au cours du dernier demi-siècle. Le nouveau ministre des Affaires Etrangères, défenseur ardent du droit d'ingérence s'exprimera sans doûte sur le sujet dans les jours qui viennent, car une solution doit être trouvée avant que le Hamas n'ait tous les pouvoirs. Les derniers développements semblent montrer que l'OLP cherche à obtenir le limogeage du gouvernement du Hamas, c'est peut-être une piste, bien qu'elle soit fragile car elle pourrait être vue par le peuple comme une remise en cause de la démocratie. Pourtant en ces temps de crise, il faut agir et vite avant qu'il ne soit définitevement trop tard.

Israël assiste impuissant à l'embrasement de la région avec, outre les avancées de ses opposants les plus durs à Gaza, l'assissanat du député libanais Walid Eido. Pourtant son actualité intérieure est dominé par un fait plus réjouissant, l'accession de Shimon Peres a la présidence de la République. Je tenais à profiter de la modeste tribune qui m'est offerte ici pour rendre hommage à cet ami, ce personnage exceptionnel dont le parcours est couronné par ce poste plus honorifique que politique. C'était sa dernière bataille, je suis heureux qu'il l'ait gagnée et je gage que sa voix de modération continuera à porter, dans son pays et dans le monde.

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Enfin, je ne pouvais pas faire l'impasse sur la question qui fâche dans les rapports entre pays européens, à l'heure ou un concensus est en train de se créer autour de l'idée du traité simplifié du président français. Je parle bien entendu de l'adhésion turque, cette pomme de discorde que Monsieur Sarkozy a habilement utilisé pendant la campagne et qu'il sera je l'espère habilement dissimuler maintenant, jusqu'à ce que le choix soit clairement posé aux français par référendum. Il est important de rappeler un fait de taille : le problème ne se pose pas d'une adhésion imédiate, il est de savoir s'il faut laisser se continuer les négotiations pour une adhésion au plus tôt dans une dizaine d'années, lorsques les conditions de ladite adhésion seront réunies. Là dessus, Sarkozy peut avoir joué un jeu sur le temps en pariant que quoi qu'il arrive, l'adhésion éventuelle ne se ferait pas sous son quinquennat. Pour autant, je réaffirme aujourd'hui ce que j'ai toujours déclaré :
« la Turquie relève de l’espace européen ; l’Europe ne saurait être limitée par des conceptions géographiques ou des préjugés culturels ». J'estime donc qu'il convient de proposer un partenariat privilégié dans l'immédiat et de laisser à la Turquie l'occasion de démontrer sa bonne volonté, notamment en matière démocratique. Pour calmer l'opinion publique, Nicolas Sarkozy peut au nom de la France mettre l'accent sur la question des droits de l'homme, et la reconnaissance du génocide arménien, comme préalable à la reprise des négociations, mais il faut se garder de provoquer une crise qui détournerait le prochain sommet européen de ses objectifs les plus importants, à savoir la relance de l'Europe et la forme du traité simplifié.
J'ajoute que le prochain grand sujet pour l'Europe, dans 20 ou 25 ans sera sans doûte la question de l'adhésion de la Russie. La nouvelle crise sur les missiles américains lors du G8 l'a prouvé, les russes souffrent d'être au porte de l'Occident, cette question viendra inévitablement un jour. Comme Jacques Attali, je suis favorable à ce mouvement formidable qui verrait, pour reprendre la formule de mon vieil adversaire une Europe allant "de l'Atlantique à l'Oural" et en l'occurence même au delà.
Quel sont vos avis sur le sujet?

Publié dans mitterrand.2007

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L
Un peu laborieux votre argumentaire pour la défense de J.C.Cambadélis.- qui a dit "tous pourris" ? je relis et ne vois rien de tel. Par contre ce qui est exprimé, est : tant que ce parti présentera (pour la n ième fois, qui plus est) des hommes aussi peu nets que lui, alors ne pas s'attendra à une participation massive ni à un engouement pour ces candidats, ce qui rejaillit sur tout le parti socialiste malheureusement. - quant à sa condamnation pour l'histoire de la MNEF, il vaut mieux ne pas trop s'appesantir sur le sujet. Et trouver que la peine fut  "légère"  (un an, quand même, et grâce à des questions de procédure) me pose question...Si elle a changé de nom, pour couronner le tout, c'est bien que... Et l'on serait amené à parler des relations "privilégiées" et financières du PS et d'autres éléphants pendant des décennies avec cette mutuelle. Je pourrais écrire un roman à ce sujet. Ne me titillais donc pas !ciao.
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G
Comme vous me l'aviez demandé, je vous informe qu'une nouvelle note vient d'etre postée sur mon Blog : "Besson: Agitateur et Kamikaze?"A bientot,  et merci d'avoir batisé les commentaires "in House"
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P
A propos de la Turquie, je suis étonné que vous insistiez sur la condition préalable de la reconnaissance du génocide arménien (c'est certes important, mais ça a attendu un siècle, l'urgence est discutable, et ça relève surtout de l'Empire Ottoman) en omettant de dire fût-ce un mot de l'occupation militaire de 40% du territoire d'un pays membre de l'Union, démocratique et pleinement respectueux des droits de l'homme, et dont le régime n'a plus rien à voir avec celui de la poignée de voyous, manipulés par Kissinger et ses amis fascistes d'Athènes, qui avaient renversé Makarios il y a trente ans et fourni un prétexte à Ankara pour intervenir et assouvir un vieux rêve expansionniste. Le refus d'Ankara de retirer ses soudards de Chypre, bien que les Turcochypriotes soient impatients de jouir enfin du statut d'Européens qui serait légitimement le leur sans cette occupation, est une injure à l'Europe. Il prouve au moins (ce dont tout le monde se doute) que la Turquie actuelle n'est qu'une démocratie laïque de façade, qu'elle est en fait un état parcouru de courants nationalistes et islamistes, sous surveillance militaire, avec la bénédiction de Washington…
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F
Je parlais sur le plan des principes. Votre remarque est juste, et si je trouve vos conclusions sur Kissinger un peu hâtives pour le moins, le problème de Chypre est important.Merci de votre contribution,Bien à vous.